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Comment les voyages m’ont fait aimer la France :

francais-a-l-etrangerJe n’avais jamais particulièrement aimé la France. Je veux dire, je ne m’étais jamais vraiment posé la question. Je suis né en France, j’y ai grandi, je suis allé à l’école de la République, j’ai bénéficié de tout un tas d’aide de l’état au cours de ma vie, allant de la sécurité sociale à la bourse pour mes études. J’ai toujours eu conscience de la chance d’être né ici, avec toutes les avancées sociales et les droits dont dispose chacun d’entre nous, mais je n’avais jamais pris conscience que j’étais français, et que cela signifiait quelque chose.

J’ai dû chanter la marseillaise une seule fois dans ma vie, pour la finale de la coupe du monde de foot en 2006. J’ai vibré quand les Experts (les handballeurs bien sûr, je ne parle pas de la série américaine) ont remporté les Jeux Olympiques, quand Laure Manaudou pulvérisait des records de vitesse, ou ce genre de choses. Mais en dehors du sport, bien que je sois né, que j’ai grandi et vécu quasiment toute ma vie en France, je n’ai jamais eu le sentiment d’aimer vraiment mon pays, ni même d’appartenir à un quelconque ensemble national.

C’était plutôt l’inverse, d’ailleurs. A force d’entendre partout que rien ne va dans notre pays, que la crise gronde, que les gens dépriment, que c’était mieux ailleurs/avant, j’avais presque développé un sentiment de dégoût, de honte, à l’idée de m’affirmer comme français. Pour tout vous dire, c’est le drapeau suédois qui flottait dans la chambre de mon enfance. Un pays dont la mythologie et l’histoire viking me fascinaient.

drapeau-suedois

D’ailleurs, en France, on ne nous apprend pas à aimer notre pays. Les cours d’éducation civique ou d’histoire sont davantage des moments d’auto-flagellation (bouh les rois méchants, bouh Napoléon l’assassin, bouh la colonisation, bouh tout le monde) que des moments où l’on met en avant ce qui fait notre spécificité culturelle, et d’en profiter pour appuyer sur ce que nos ancêtres ont fait de bien afin de donner au peuple français actuel une bonne raison d’être fier de ce qu’il est (ce qui, à mon sens, créerait une certaine cohésion sociale et lutterait contre le communautarisme en pleine expansion).

Bref, voila le constat. Je ne m’étais jamais posé la question de ce que cela impliquait pour moi d’être français, ou de l’immense honneur que c’était de faire partie de cette communauté nationale.

Jusqu’à ce que je commence à voyager.

Car sur la route, j’ai remarqué deux choses.

Beaucoup d’étrangers aiment la France et connaissent son histoire bien mieux que les français eux-mêmes…

A l’étranger, dans un grand nombre de pays, être français produit toujours son petit effet.

Voici quelques exemples rapides.

En Lituanie, quand je me suis connecté à Couchsurfing pour trouver un hôte à Kaunas, j’ai été contacté par une jeune femme du nom de Laura. Elle adorait la France, était en train d’apprendre notre langue. Elle fut tellement surprise et ravie qu’un français débarque dans sa ville qu’elle voulut absolument m’offrir un café pour discuter.

Centre ville de la jolie Kaunas, Lituanie.
Centre ville de la jolie Kaunas, Lituanie.

Quelques jours plus tard, à Vilnius, je participais à une soirée avec des lituaniens. A un moment, un gars avec qui je n’avais pas encore parlé me demande d’où je viens. Quand je lui réponds ‘I am french’, son visage s’illumine. Le type est un des rares œnologues de Lituanie. Il connait la France des vins par cœur, et rêve de venir travailler chez nous. Il était tellement ravi de rencontrer un français qu’il ma tenu la jambe toute la soirée, à me poser des questions sur mon pays et à me répéter son envie de venir y vivre.

En Suède, j’ai eu une expérience dans le même genre. Avec Louise, une jolie brune que j’ai déjà mentionnée dans un des premiers articles de ce blog. Louise connait l’histoire de France mieux que vous et moi. Elle parle un français plus riche que la plupart des lycéens de banlieue (ce qui n’est pas dur, vous me direz), et a lu les œuvres de Balzac, Voltaire, Hugo, et de quelques autres, me foutant une honte monumentale en me demandant ce que j’en avais pensé (« ouai, c’est pas mal, hein » – ai-je répondu piteusement, sans oser lui avouer que je n’en avais jamais lu une ligne).

Des histoires comme ça, j’en ai des charrettes entières.

En Espagne, Monika, une jolie polonaise, m’est littéralement tombée dans les bras quand elle a appris ma nationalité, et n’a pas voulu me lâcher tant que je ne lui aurais pas promis un verre ensemble pour lui apprendre quelques mots de notre langue.

Au Népal, Kousang, un sherpa, m’a fait halluciner en s’adressant à moi dans un français excellent. Son rêve ? Se rendre à Chamonix pour randonner dans les Alpes.

Lors de ma visite de Florence, j’ai rencontré un charmant couple qui parlait un français parfait et connaissait l’Histoire de France mieux que mon prof de lycée.

Je ne compte pas non plus les innombrables références au foot, au cinéma (j’ai croisé des fans de Godard, Truffaut, …), à la littérature, et au reste.

Il n’y a qu’en France que j’ai vu aussi peu de fibre patriotique

Alors ok, je n’ai pas été dans les 200 et quelques pays du monde. Mais partout où je suis passé, à différents degrés, j’ai trouvé que les gens aimaient vraiment leur pays, en étaient fiers, et portaient haut ses couleurs.

Je pourrais prendre l’exemple américain qui est le plus flagrant, mais ça ne surprendra personne.

Alors je vais faire plus original. L’Estonie par exemple. C’est un pays tout jeune, moins de 30 ans d’existence. Et les estoniens ADORENT leur pays, ils ont une véritable fibre patriotique. Des drapeaux estoniens flottent à toutes les maisons, et pour avoir discuté du sujet avec plusieurs d’entre eux, ils sont tous extrêmement fiers de faire partie de cette nation.

Ce ne sont pas les seuls.

Je me rappelle avoir vu à Kuala Lumpur, en Malaisie, des panneaux en anglais disant -je cite de mémoire- « nous sommes souriants, nous sommes accueillants, nous sommes malaisiens !« . Dans le métro !

Vous imaginez ça à Paris ? Les publicitaires qui oseraient diffuser un message pareil dans nos métros seraient probablement traînés devant les tribunaux pour incitation à la haine raciale, ou quelque chose du genre.

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A Oslo, des collégiens défilent en portant le drapeau de leur pays.

Autre exemple : les indiens. Prochaine fois que vous croisez un indien, dites-lui que vous aimez beaucoup son pays. Y’a de grande chance pour qu’il vous tombe dans les bras avec un sourire jusqu’aux oreilles, comme si Sharon Stone venait de déposer à ses pieds un bouquet de rose accompagné d’un mot d’amour.

Chez nous, si on a le malheur de dire qu’on aime la France, qu’on est fier de notre histoire, de notre culture, on devient suspect. Si on suspend un drapeau français à la fenêtre : les gens nous regardent de travers, et on se retrouve classé dans la catégorie ‘méchant facho néo-nazi dangereux raciste klu klux klan‘.

Bref, les voyages m’ont fait aimer la France, et m’ont rendu fier d’être français

Tous ces gens amoureux de la France, de notre culture, de notre langue, de notre cuisine, m’ont fait réalisé à quel point j’avais de la chance d’être né et d’avoir grandi dans ce petit coin de la planète. Ils m’ont donné envie de m’intéresser à l’histoire de mon pays, à ses valeurs, à l’image qu’il véhicule. Je me dis que tous ces gens ne peuvent pas avoir tort : s’ils aiment tous la France, il y a forcément une raison. A moi de la découvrir.

C’est comme ça que j’ai eu envie de redécouvrir notre histoire, notre culture, de me mettre à la cuisine française. De découvrir notre patrimoine cinématographique.

C’est comme ça que je me suis enfin mis à aimer la France. Et à être, enfin, fier d’être français.