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A la découverte du site Maya de Tikal, au Guatemala :

Article rédigé par Mikael, fervent défenseur du tourisme alternatif et rédacteur en chef du site Voyageurs du Net. Il raconte sa découverte du site maya Tikal, au Guatémala. Je lui laisse la plume :

Après avoir patiemment construit un solide projet associatif de cours de journalisme, Kalagan et moi-même entreprenons un voyage au Guatémala. Pour nous y rendre, les billets directs étant trop onéreux, nous choisissons l’option d’un vol direct de Francfort à Cancún, sur Condor Airlines. On s’en tire pour une somme raisonnable de 420€… et encore, il y a bien moins cher.

Nous atterrissons le 3 septembre dans cette capitale du tourisme de masse et de la débauche irresponsable. Et nous n’y faisons pas de vieux os, partant le surlendemain, le temps de se faire – un peu – au décalage horaire et récupérer du vol. Nos ateliers doivent débuter à 1300 km de là deux semaines plus tard jour pour jour. Aussi, nous nous mettons rapidement en route et, à cette immonde porcherie balnéaire, nous préférons la superbe et tranquille lagune de Bacalar, où nous passons quelques journées et nuits délicieuses, avant de descendre en direction du Guatémala. Quelques baignades dans la lagune ou dans le cenote azul, puis, avec le léger regret de n’avoir pas vu d’autres cenotes de la péninsule du Yucatan, nous prenons la direction du Guatémala.

Notre étape suivante est l’île de Flores, situé dans le département du Petén, la plus grande région du Guatémala, située au nord. Là se trouvent plusieurs des vestiges archéologiques majeurs de la civilisation maya. C’est le cas, notamment, du site dit « El Mirador », non loin de la frontière mexicaine, le plus grand site archéologique mésoaméricain, dont les fouilles particulièrement actives depuis les années 2000, ont permis de grandes avancées de l’historiographie maya. Plusieurs compagnies proposent d’y accéder lors d’un grand trek dans la jungle de 5 jours, avec à la clé la visite de 4 autres sites d’importance, cernés par la jungle.

Le manque de temps ne nous permet pas de nous y rendre – mais nous ne désespérons pas de le faire dans les mois prochains, puisque nous retournons au Guatémala après une parenthèse mexicaine (notamment pour y évaluer la possibilité de futurs ateliers). Nous choisissons donc de nous rendre à Tikal, consacré en 1979 par le label « Patrimoine mondial » de l’Unesco, site majeur du tourisme majeur en matière d’archéologie maya dans cette région où les sites mayas abondent.

Nous rencontrons Oscar, de l’agence Reino Kan Travels, laquelle travaille en accord avec la coopérative Carmelita, dont il fait partie, et qui a la charge de la conservation d’une large zone protégée du Petén. C’est donc par lui que nous passons pour nous rendre en minibus jusque sur ce site. Quelques semaines plus tôt, après que des touristes furent assaillis sur ce même chemin par des bandits, une opération militaire avait conduit à plusieurs arrestations : cela devrait suffire à nous rassurer… Mais dans un tel pays, la violence peut surgir n’importe quand et n’importe où… ce qu’il convient de garder à l’esprit.

Une fois sur place, relativement tôt dans la matinée, nous commençons la visite en découvrant la merveilleuse faune qui y abonde : vols de toucans, crapaud… miniature (de la taille d’un ongle), singes-araignées et bien d’autres encore.

Lors de la visite guidée, je me tiens un peu à l’écart de la récitation du guide, pour discuter avec un archéologue qui se joint discrètement au groupe… et m’explique les coulisses de l’histoire maya. Si bien que la visite s’avère plus enrichissante à son contact qu’à celui du guide dont les blagues sentent le remâché. Avec patience et pédagogie, il répond à mes questions sur l’organisation sociale de la société maya à l’époque classique (Tikal étant un site majeur de cette période qui s’étend de 250/300 à 900) : comment les prêtres et aristocrates vivaient en surplomb des autres castes, comment ceux-ci étaient si mieux nourris et si peu contraints aux activités harassantes qu’ils atteignaient parfois 1,80m (contre 1,40-1,50m pour les paysans), comment les paysans n’étaient considérés que comme des bêtes de somme et des objets faits pour produire et qui n’avaient pas de sépulture, et étaient voués surtout à travailler pour les dominants, porter des charges, manger moins bien et faire la guerre décidée par ceux qui ne la pratiquaient pas… On en tirerait presque des observations politiques pour aujourd’hui… D’autant que l’une des hypothèses pour l’effondrement et l’abandon de la cité de Tikal, outre celle d’ailleurs compatible de l’épuisement des ressources naturelles environnantes, est celle d’une révolte populaire contre l’exploitation des classes dominantes. La lutte des classes dans la jungle !

A défaut de pouvoir prétendre à une approche très nourrie d’une culture qui me reste encore très étrangère et qui, malgré quelques analogies que je tente avec la civilisation hellénique, est très différente, j’ai passé là avec Kalagan et ma compagne d’alors, quelques heures de ravissement. La faune très abondante de coatis, singes, papillons, araignées, toucans et bien d’autres animaux, a compensé le trop épais mystère de ruines qui, faute d’imagination nourrie par des lectures historiques et faute peut-être d’un guide moins récitant, se rapprochent davantage d’amoncellements – impressionnants, certes, par leur caractère imposant – de pierres que du squelette d’une civilisation dont nous saurions recomposer mentalement la chair.

J’en repars en me disant que, somme toute, le tourisme de masse consomme des lieux et œuvres comme des « must-have-seen » (Tikal ici, la Joconde au Louvre…), comme des produits marketing qu’il « faut » avoir vu et consommé… sans jamais les comprendre vraiment. C’est pourquoi tant de gens se photographient devant tel ou tel monument, pour dire « j’y étais », comme s’ils s’inséraient dans une carte postale, comme on cherche à « passer à la télé », à intégrer le monde des images du Spectacle généralisé dont parlait Guy Debord.

Au total, il m’apparaît préférable de privilégier des sites archéologiques plus petits, moins touristiques, où les groupes de visiteurs (quand il y en a) sont plus petits et les guides plus disponibles et passionnés. Car il est préférable de pouvoir se représenter mentalement une civilisation sur un petit site même très dégradé, plutôt que se rendre sur des ruines qu’on ne peut relier à grand chose. Tikal reste cependant une visite très hautement recommandable pour tout passionné d’archéologie mésoaméricaine et pour le simple plaisir de la promenade dans un lieu à la nature profuse.

Le lendemain, nous partions pour Quetzaltenango, dans l’ouest du pays, pour débuter notre première série d’ateliers de journalisme au sein de l’Alliance française… et pour de tout autres explorations, davantage consacrée aux merveilles naturelles dont le pays abonde.

Merci à Mikael pour cet article ! Si vous aussi vous aimeriez découvrir les sites Mayas, cliquez sur J’aime et partagez le sur Facebook :