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Digital nomade : l’envers du décor (ou ce que l’on vous cache sur le travail en ligne)

On en entend parler partout sur Internet depuis quelques années : le lifestyle du digital nomade. Celui qui travaille depuis son ordinateur, en short, sous les cocotiers, pour financer la suite de son voyage.

Le matin il blogue, l’après-midi il bronze. Quand ce n’est pas les deux en même temps.

Alors, oui ce mode de vie est possible : je l’ai vécu pendant plusieurs années (et je le vis encore même si depuis que je suis en Europe de l’Est, le côté « bronzette » est un peu passé aux oubliettes). Et oui, ce mode de vie offre des possibilités absolument incroyables, la principale étant de pouvoir découvrir le monde sans être obligé de rentrer à la maison quand le portefeuille est vide. Travailler sur internet, c’est s’offrir une vie de voyages, sans date de retour et sans contrainte. C’est s’offrir la possibilité de vivre au soleil toute l’année pendant que les copains sont en France, dans la grisaille du métro-boulot-dodo.

Ça parait génial hein ? Pourtant tout n’est pas rose dans le quotidien du digital nomade. Ce mode de vie a beaucoup d’inconvénients. Qui sont passés sous silence par la plupart des blogueurs pour qui ça ne serait pas très ‘vendeur’.

Voici l’envers du décor, histoire de remettre les pendules à l’heure à ceux qui pensent que c’est LE mode de vie idéal.

Les 7 inconvénients du ‘digital nomade lifestyle‘ que les blogs populaires ne vous racontent pas

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Le digital nomade passe sa vie derrière un écran d’ordinateur

Si vous décidez de travailler sur internet tout en voyageant, c’est une obligation : vous allez passer une dizaine d’heures par jour sur votre ordinateur. A mettre à jour votre blog, à répondre aux emails, à démarcher des partenaires, à vous arracher les cheveux (si vous en avez, pour moi ce n’est plus un problème 🙂 ) sur un bug technique, etc.

Si vous êtes freelance ou consultant dans un domaine précis, vous passerez un temps fou à renvoyer des devis, répondre à des demandes d’informations dont 80% n’aboutiront sur rien du tout, et puis bien sûr à bosser comme un taré. Non-stop. Parfois des journées entières sans lâcher votre ordinateur (et donc sans rien voir du lieu où vous vous trouvez).

Vous devez être au courant de ça. Car autour de vous, la plupart des gens seront en vacances. C’est à dire en mode « je voyage à crédit » (= en utilisant leurs économies), donc ils auront leurs journées entières pour profiter. Cela ne sera pas votre cas : vous n’êtes pas en vacances, vous êtes simplement en voyage, dans le sens « déplacement ». Et il vous faudra gagner votre croûte tous les jours pour que ce voyage puisse durer le plus longtemps possible.

Bien sûr, vous pourrez mettre en place un système intelligent pour éviter de lier le temps passé à travailler avec les revenus obtenus (ce que je fais avec ce blog, par exemple). Mais en tant que tel, c’est déjà un boulot énorme et il faudra patienter plusieurs mois avant d’en voir les premiers résultats.

J’ai référencé 31 techniques pour voyager à plein temps.
J’en parle dans ce loooong article, ici.

Le digital nomade travaille seul l’immense majorité du temps

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Ça c’est moi, sur mon ordi de poche, lorsque j’étais en Asie.

Si vous êtes une personne sociable, qui aime le contact avec les autres êtres humains, alors sachez que travailler sur internet pendant votre voyage va considérablement vous isoler.

Je le disais dans le paragraphe ci-dessus : les autres seront en mode « je profite » pendant que vous serez en mode « je taff sur mes projets« . Cela créera une distance avec eux.

En parallèle, vous serez évidemment tout seul derrière votre ordi. Même si vous avez des partenaires ou des clients, cela restera des relations virtuelles avec qui vous échangerez par mail ou par Skype.

Si aujourd’hui vous avez l’habitude de travailler en équipe et que vous vous apprêtez à franchir le cap pour devenir digital nomade, c’est à dire travailler sur internet tout en voyageant, cela peut faire un vrai choc : ce n’est pas fait pour tout le monde.

Le digital nomade se tape des moments de stress monstrueux quand les revenus ne suivent pas

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Travailler seul sur internet, en voyage ou non d’ailleurs, cela signifie très souvent être indépendant (= être entrepreneur). Et la principale différence entre un entrepreneur et un salarié, c’est la façon dont on perçoit nos revenus.

Le salarié touche toujours la même somme, toujours à la même date. Peu importe son boulot, tant qu’il est présent sur le lieu de travail et qu’il donne à peu près l’illusion à son patron qu’il fait ce qu’on lui demande de faire, le salaire tombe à la fin du mois. Cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de stress dans un boulot salarié, mais en tout cas le stress ne vient pas du fait de savoir si on va pouvoir remplir le frigo, ou s’il va encore falloir manger des pâtes au beurre le mois prochain.

En revanche, l’entrepreneur ne sait jamais à l’avance combien il va gagner. S’il a des contrats, les revenus tombent. Parfois même de bons revenus. S’il n’a plus de contrat, il n’a plus un sous qui rentre. Et je peux vous garantir un truc, après six ans de digital nomadisme au moment où j’écris ces lignes, c’est que ces moments là arrivent régulièrement, et que ce n’est vraiment pas drôle.

Le stress est inhérent à la vie d’entrepreneur. Et encore plus d’un entrepreneur nomade car on rajoute le facteur aléatoire du cadre de travail : la tranquillité, le fait de trouver une connexion internet de qualité, la sécurité, …

Si vous n’êtes pas imperméable au stress, ou au minimum capable d’encaisser une bonne dose de cheveux blancs quand les problèmes pointeront le bout de leur nez, alors le mode de vie de digital nomade n’est peut-être pas fait pour vous.

Je mets juste un bémol à ce que je viens d’écrire : il est possible d’être digital nomade tout en étant salarié. A mon sens, c’est l’idéal car on lie la sécurité des revenus avec la liberté géographique (relative, il faut tout de même rester à portée de fusil de son employeur, mais c’est déjà ça). J’en parle en détails dans mon livre Offrez-vous une vie de voyages dont l’article de présentation se trouve ici.

Le digital nomade traîne des kilos de matériel informatique dans ses bagages

… et vous allez flipper pour leur sécurité au moins la moitié du temps.

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Si vous êtes un habitué de mon blog, vous connaissez la musique, je le répète souvent : pour voyager heureux, voyager léger.

Or, en tant que digital nomade, vous allez avoir sur le dos, en plus de vos affaires de voyage classiques, tout votre bardas informatique. Et je peux vous assurer que ça va vite peser ! Sans compter que tout ce beau matériel coûte cher. Et quand vous allez traverser des pays un peu craignos, ou qu’il faudra simplement mettre votre sac dans la soute d’un bus, vous allez vous faire du mauvais sang. Un mauvais choc ou une mauvaise rencontre, et adieu le Mac flambant neuf.

Si en plus vous avez la ‘bonne’ idée de monter un blog de voyage, vous allez sûrement vouloir emmener du matériel photo et vidéo. Encore des trucs qui prennent une place monstre dans les bagages et qui pèsent un poids conséquent.

Parfois, je regrette de ne pas être un voyageur « normal », et emmener simplement mes slips et ma brosse à dents.

Il passe son temps à courir après les (bonnes) connexions internet

Digital nomade avec un petit budget, ça veut souvent dire dormir dans des auberges de jeunesse où 50 personnes se partagent le wifi. La moitié d’entre elles seront en train de mater un film en streaming ou de Skyper avec leur famille. Et toi, t’es là, à mettre 20 minutes à envoyer une photo sur ton blog, ou à prier pour que les documents que tu dois envoyer en pièce-jointe à tes clients finissent par s’uploader correctement.

Pendant la journée, idem. Vous allez être en train de visiter une ville, et puis hop, une idée va surgir dans votre esprit (ou une alerte sur votre téléphone), et il va vous falloir trouver une connexion internet dans la minute.

Je ne vous raconte même pas le nombre de fois où j’ai squatté des réseaux wifi ouverts, en ville, téléphone à la main, pour checker mes mails et répondre à mes clients. Et encore, quand je n’avais pas de smartphone, c’était carrément avec l’ordi portable que je me calais en pleine rue pour choper un wifi et écrire un mail rapidos (parfois je me prenais quand même un café dans un bar, mais j’ai plusieurs fois eu la désagréable surprise d’entendre le serveur me dire « désolé le wifi ne marche pas aujourd’hui« , et me retrouver avec une conso sur les bras et l’impossibilité de travailler).

Ce n’est pas forcément très fun de devoir passer la moitié de la journée à chercher un wifi potable quand on est en voyage. On préfèrerait profiter, découvrir des lieux, faire de la rando, rencontrer des gens. Pourtant, pour le digital nomade au nez dans l’ordinateur, c’est aussi la réalité.

Le digital nomade doit constamment acquérir des nouvelles compétences (parfois franchement chiantes)

Si vous lancez votre propre activité en ligne, c’est que vous avez des compétences précises dans un domaine. Par exemple, vous êtes graphiste, et vous savez utiliser Illustrator à la perfection (ou d’autres logiciels, j’y connais rien en graphisme 🙂 ). Ou vous êtes traducteur, et votre compétence principale c’est la maîtrise de langues étrangères.

Or, en tant que digital nomade indépendant, vous allez forcément devoir apprendre d’autres compétences indispensables pour réussir dans le métier. Vous allez devoir vous former au marketing (pour trouver des clients) et à la comptabilité (pour être carré au niveau administratif). Vous allez également devoir acquérir des bases dans tous les métiers du web (pour créer et maintenir votre site, gérer votre communauté, etc…). Et probablement pas mal d’autres trucs en fonction de votre secteur d’activité.

Ce n’est pas forcément difficile, mais cela prend du temps. Et si ce n’est pas une passion pour vous, ça ne sera pas très funky. Mais c’est indispensable (au moins la compta et les bases du marketing).

Sans compter que pour rester au top dans votre domaine d’activité, il vous faudra vous former constamment pour ne pas être dépassé et submergé par la concurrence (ça arrive plus souvent qu’on ne le croit). Bref, beaucoup de boulot.

Vous avez intérêt à avoir des gens de confiance en France

Même une fois devenu digital nomade, vous allez probablement garder votre « domicile principal » en France. Parce que vous êtes français (ou belge, ou suisse, etc, adaptez selon votre pays d’origine), et que vous êtes lié à ce pays au niveau administratif. Vous allez donc y recevoir du courrier de temps en temps.

Assurez-vous d’avoir un proche chez qui vous pouvez vous domicilier afin de recevoir vos correspondances importantes, et de vous les faire transmettre en temps et en heure quand c’est nécessaire (et éventuellement de lui donner une procuration pour faire certaines démarches à votre place).

Tout ça n’est pas très fun, j’en suis conscient, mais c’est aussi la réalité du digital nomade « je bosse en short depuis les cocotiers« .

Tout ça vous faire peur ?

Je sais que tout ce que je viens d’écrire pourrait vous décourager ou vous faire peur. Pas de panique : devenir digital nomade est également une expérience passionnante, enrichissante, et qui peut transformer votre vie pour le meilleur. Avec les lignes que je viens d’écrire, je voulais surtout rétablir une sorte d’équilibre avec ce que l’on peut lire partout sur internet, où le digital-nomade lifestyle est présenté comme le bonheur suprême.

Comme tout style de vie, celui-ci a ses avantages et ses inconvénients. Il me paraissait important de mettre en lumière aussi les inconvénients, afin d’éviter à certains d’entre vous de foncer tête baissée dans un mode de vie qui pourrait ne pas vous correspondre (et il n’y a pas de mal à ça : c’est une façon de vivre vraiment à part et ce n’est pas fait pour tout le monde).

Dans la deuxième partie de cet article, je voudrais simplement partager avec vous mes 4 principaux conseils, acquis au fil de mes années sur la route, pour vous permettre de vivre au mieux votre propre expérience de digital nomade. Les voici.

Les bonnes pratiques pour devenir un digital nomade épanoui :

Soyons clair : c’est à force de passer du temps sur la route, de doser entre travailler et voyager, que vous allez réussir à trouver votre rythme. Avec ces conseils, vous devriez déjà trouver un certain équilibre dans votre quotidien de digital nomade, mais l’ingrédient qui vous donnera vraiment le sentiment de vous épanouir dans ce mode de vie, c’est le temps.

Rester suffisamment longtemps au même endroit

L’objectif : travailler efficacement et avoir le temps de découvrir les lieux.

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La plupart des backpackeurs changent de lieu toutes les 2 ou 3 nuits. C’est ce que je faisais aussi, au début, avant de me rendre compte que c’est juste impossible de tenir un tel rythme si on veut travailler efficacement ET avoir le temps de découvrir la ville où on se trouve.

D’ailleurs si on raisonne : pourquoi la plupart des voyageurs vont vite ? Parce qu’ils ont peu de temps. Pourquoi ils ont peu de temps ? Parce qu’ils sont en vacances (= congés), qu’ils voyagent sur leurs économies, et qu’ils veulent en voir le plus possible en y passant le moins de temps possible.

Vous êtes dans une logique complètement différente : vous n’êtes pas pressé par les congés payés ou par un patron qui vous impose un retour au bureau. Vous gagnez votre vie pendant votre voyage, donc vous pouvez prendre votre temps.

Le minimum pour moi aujourd’hui c’est de rester une semaine complète au même endroit. Parfois, quand je me sens bien, j’y reste même beaucoup plus longtemps. Je suis en ce moment à Zagreb, ça fait pratiquement six mois que j’y ai posé mon baluchon. Je ne sais pas combien de temps je vais y rester, mais tant que je m’y plais et que je ne m’ennuie pas, je reste.

Se trouver un espace en coworking

L’objectif est double :
– ne pas galérer avec les connexions internet,
– rencontrer des gens dans le même délire que vous.

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Je le disais dans la première partie de cet article, le digital nomade passe ses journées sur son ordinateur, et travaille seul la plupart du temps. Ses partenaires et ses clients sont derrière un écran à l’autre bout du globe. La solitude peut vite peser sur ses épaules.

Il est primordial, à mon sens, d’investir dans un petit espace de coworking dès que les revenus le permettent pour pouvoir travailler dans les conditions d’une vraie petite entreprise. Vous pouvez louer ces espaces à l’heure, à la journée ou à la semaine, donc pas de problème d’engagement si vous voulez bouger fréquemment.

Dans ces espaces, vous allez rencontrer d’autres digital nomades et d’autres entrepreneurs avec qui vous allez pouvoir échanger sur le sujet qui vous occupe du matin au soir (et parfois du soir au matin). Vous allez trouver des nouvelles idées pour développer vos projets, parfois même vous y trouverez des clients ou des partenaires. Et surtout vous rencontrerez des gens comme vous. Ce qui est plutôt rare, vous en conviendrez.

Se fixer des horaires de travail (et les respecter)

L’objectif : profiter du voyage et ne pas devenir fou.

L’espace de coworking a une troisième conséquence positive : celle de vous forcer à vous fixer des horaires de travail (et à les respecter).

C’est certainement le point le plus difficile quand on travaille sur ses propres projets : on est excité, passionné, on a hâte de les développer et d’en cueillir les fruits.

Pourtant, pour avoir une vie équilibrée, il est important de sortir la tête du guidon et de faire autre chose que simplement travailler sur un ordinateur. Fixez-vous des horaires (perso mon rythme de croisière est de travailler le matin et de profiter l’après-midi, mais j’alterne avec bosser à fond 4 jours puis me reposer/visiter 3 jours).

A vous de voir ce qui vous convient le mieux !

Se verser un revenu fixe et plutôt faible (et mettre le reste de côté en prévision d’une mauvaise passe)

L’objectif : ne pas se retrouver dans la merde en cas de chute brutale des revenus. Ce qui finit immanquablement par arriver quand on travaille sur internet.

Tiens, pour ma part, j’ai subit une belle perte de mes revenus du blog quand Google a décidé de remanier son algorithme, en mars dernier. Et je sais que je ne suis pas le seul blogueur-voyage à qui c’est arrivé.

Demandez à n’importe quel travailleur du web qui a quelques années d’ancienneté, tous vous diront la même chose : les revenus d’un travail sur internet peuvent être stables pendant des mois, puis subir des variations brutales du jour au lendemain. Protégez-vous autant que possible des aléas des revenus (surtout des chutes) en vous versant des revenus fixes, et de façon à mettre un max d’argent de côté pour parer une mauvaise passe.

Cela peut vous paraître idiot ou inutile si vous êtes salarié et que vous êtes habitué à voir un salaire tomber tous les mois sur votre compte en banque, mais croyez-moi, une fois devenu indépendant, cela peut vraiment vous éviter de vous retrouver dans la merde.

Alors, êtes-vous fait pour être digital nomade ?

A la lecture de cet article, vous vous dites peut-être que devenir digital nomade est un pari risqué, que ce n’est pas pour vous.

La vérité, il n’y a qu’une seule façon de la trouver : en testant.

Si vous êtes tombé sur mon blog, c’est que ce mode de vie vous intrigue et vous attire un minimum. Alors peut-être que vous devriez tenter votre chance.

Malgré les aspects négatifs exposés ici, je tiens à préciser que j’ai simplement cherché à rétablir un certain équilibre avec les articles un peu « bisounours » qu’on peut trouver un peu partout sur le web et qui masquent une part importante de la réalité.

Mais devenir digital nomade est une opportunité extraordinaire pour tous ceux qui, comme nous, rêvent de voyager à plein temps, de découvrir le monde, de sortir des sentiers battus et d’explorer à fond ce que l’ère digitale qui s’ouvre à nous a à offrir. Nous sommes des pionniers dans un mode de vie qui va tendre à se généraliser dans les années à venir. Et, plus pragmatiquement, je crois qu’il y a encore beaucoup de places à prendre avant que la concurrence ne devienne trop rude. Alors, allez-vous vous lancer ?

Si vous cherchez des idées de métiers à faire sur la route, je vous invite à lire mon livre « Offrez-vous une vie de voyages – 31 techniques pour voyager à plein temps« , dont la page de présentation se trouve ici. Aucun doute qu’il y aura des idées qui feront tilt et vous permettront de vous lancer 🙂

A bientôt !

Jérémy.